La vapeur de liquide de cigarette électronique est-elle toxique ? La question de l’acroléine.

Un chercheur analyse des échantillons

Un chercheur analyse des échantillons

Une étude portant sur l’analyse du niveau de substances cancérigènes et toxiques de la vapeur de cigarette électronique vient d’être publiée le 06 mars 2013 dans la revue Tobacco Control. Les résultats sont sans appel la Ecigarette est très substantiellement moins nocive que la cigarette classique. Cependant, contrairement à une autre étude déjà parue sur la cytotoxicité de la vapeur de cigarette électronique, notamment sur des cellules des poumons, certaines substances ne seraient pas totalement neutres. Néanmoins, elles seraient présentes à des quantités relativement faibles et surtout le protocole expérimental de l’étude n’est pas exempt de tout repproche. Essayons d’y voir plus clair…

Non cytotoxicité de la vapeur de Ecigarette : une étude sur des eliquides Flavour Art

A ma connaissance, on doit la première étude sérieuse sur l’analyse de la toxicité de la vapeur de liquide de cigarette électronique au projet Clearstream et plus particulièrement au Docteur Farsalinos, un toxicologue grec. L’étude portait plus précisément sur la cytotoxicité de la vapeur sur des cellules de poumons et analysait ces résultats en comparaison avec la fumée de cigarette classique.

L’étude conclut que la vapeur de Ecigarette n’est pas cytotoxique sur les cellules de poumons étudiées. Les tests ont été reproduit un grand nombre de fois et sur de nombreux arômes. Pour information, les liquides étudiés étaient ceux de Flavour Art avec précisément la même composition que celle que propose Absolut Vapor (Propylène Glycol USP: 50%, Glycérine végétale USP: 40% et selon l’arôme : eau distillée: 5 à 10%, Arômes: 1 à 5% et nicotine).

A noter qu’une étude similaire traitant de cytotoxicité sur des cellules du cœur va également bientôt être publiée et sans déflorer les résultats, les premiers éléments qui ont été communiqués indiquent qu’ ils sont très positifs pour la cigarette électronique.

Etude sur plusieurs modèles distribués en Pologne : la cigarette électronique présente de moindres niveaux de substances toxiques mais il y en aurait…

L’étude «Niveaux d’une sélection de substances toxiques et cancérigènes dans la vapeur de cigarette électronique » publiée le 06 mars 2013 dans la revue Tobacco Control par Goniewicz et al. a ravivé des questions parmi certains utilisateurs de cigarette électronique sur des forums et blogs. Certes les substances toxiques présentes dans la fumée du tabac sont nettement plus importantes que dans la vapeur de liquide de cigarette électronique, mais les chercheurs en détectent tout de même dont l’acroléine. Cette substance peut apparaître suite à un échauffement important de la glycérine végétale (la température de référence varie selon les sources mais serait d’environ 200°C) et a depuis longtemps était une source de réflexion pour les vapoteurs sur différents forums français et anglo-saxons. A noter que cuisiner avec de l’huile chauffer à plus de 180°C produit également de l’acroléine en grande quantité comme l’indique cette étude commentée sur cette page très complète dédiée à l’acroléine. Cela ne dédouane en rien le potentiel problème induit par l’acroéline avec la cigarette électronique d’autant plus que l’inhalation n’est certainement pas identique. Cependant, il est amusant de voir à quel point on peut se focaliser sur un phénomène car il est nouveau alors que certaines habitudes ancestrales pourraient tout aussi bien être analysées plus en détail à l’aune des nouvelles technologies dont dispose la science.

Le Docteur Goniewicz a récemment fait une présentation sur « Évaluation des cigarettes électronique comme source d’exposition à l’acroléine » à la Society for Research on Nicotine and Tobacco (SRNT) en s’appuyant largement sur les résultats de l’étude du 06 mars 2013.

Je me suis procuré l’intégralité de l’étude disponible sur le site Tobacco Control (téléchargement payant). Je ne peux pas faire de lien direct vers le PDF à cause de droits d’auteurs mais je présente ci-dessous les éléments les plus intéressants en particulier le protocole expérimental et les principaux résultats. On y retrouve exactement les chiffres de la présentation du Docteur Goniewicz sur l’acroéline mesurée dans la vapeur de cigarette électronique pour 150 bouffées.

L’étude porte sur 12 modèles distribués en Pologne (plus de détails sur les modèles ici). Ces modèles ont été sélectionnés en s’appuyant sur des recherches internet afin de mesurer leur popularité. Il est dommage que l’on ne retrouve pas les modèles les plus populaires en France dont l’Ego Stardust V3. Il n’y a d’ailleurs aucun modèle avec clearomiseur testé.
Les modèles utilisés pour l'étude polonaise
Tous ces modèles fonctionnaient avec des cartouches (ou cartomiseurs pour le EC08 et le EC09) pré-remplis de liquide dont on ne connaît ni l’origine, ni la composition excepté le taux de nicotine. L’expérimentation s’appuie sur une machine qui produit des aspirations sensées être similaires à celles d’un vapoteur. La mesure des produits dans la vapeur se fait sur 150 aspirations effectuées en 10 séries (toutes les 5 minutes) de 15 aspirations espacées de 10 secondes.

Matériel pour mesurer les substances de la vapeur de Ecigarette

Au final, les analyses de la composition de la vapeur indiquent que sa composition est nettement moins chargée en éléments nocifs que la fumée de cigarette. Sur les échantillons, les chercheurs trouvent en moyenne 450 fois moins d’acetaldehyde, 15 fois moins d’acroléine (voir tableau ci-dessous)…

http://www.absolut-vapor.com/addiction-tabac/wp-content/uploads/2013/03/tableau3_etude.bmp

Les résultats détaillés par modèle sont visibles dans le tableau de ce lien :

…cependant le protocole expérimental semble à revoir d’après le Docteur Farsalinos

J’ai fourni l’intégralité de l’étude au Docteur Farsalinos qui m’a fait part de son analyse que je vous livre ici après traduction (texte original à la fin de l’article). Je le remercie au passage chaleureusement pour ses commentaires et plus largement pour ses études qui aident à avancer sur la connaissance de la cigarette électronique.

«L’étude récente de Goniewicz et al. au sujet du niveau de substances toxiques dans les vapeurs de cigarettes électroniques est très intéressante puisqu’elle répond à certaines questions mais en soulève également encore plus.

Tout d’abord, il faut noter qu’il s’agit là d’une autre étude qui montre que les e-cigarettes sont beaucoup moins nocives que les cigarettes classiques. Même si certaines substances toxiques ont été trouvées, elles étaient présentes en quantités beaucoup plus faibles par rapport au tabac.

Cette étude soulève cependant de nombreuses questions. La première est la sélection des échantillons : les appareils utilisés étaient ce que nous appelons des dispositifs de «première génération». Nous savons qu’ils ne sont pas si efficaces pour faire perdurer l’arrêt du tabac. Il y a plusieurs problèmes avec de tels dispositifs tels que la faible efficacité des batteries, le goût et la quantité de vapeur produite, la durée d’utilisation avant de devoir recharger etc…

Une autre question importante est la méthodologie: 10 secondes d’intervalle entre chaque bouffée est complètement irréaliste. Nous ne pouvons pas blâmer les auteurs parce qu’ils ont utilisé cette méthode après avoir suivi 10 utilisateurs expérimentés, cependant, il faut souligner qu’à la fois la durée de la bouffée et l’intervalle utilisés dans cette étude sont irréalistes. Le court intervalle peut sans doute conduire à une surchauffe de l’appareil et la production ultérieure de substances toxiques. En outre, je ne peux pas expliquer pourquoi ils ont testé chaque appareil avec 150 bouffées. Sommes-nous sûrs que les appareils avaient suffisamment de liquide pour produire 150 bouffées ? La présence de vapeur provenant du dispositif ne peut en aucun cas garantir qu’un phénomène de « dry-puff » (« bouffée sèche » = goût de brûlé provenant d’une quantité de liquide insuffisante pour alimenter la mèche) ne s’est pas produit au cours de l’expérience. Cela peut conduire à la production de substances toxiques, mais cela représente un cadre irréaliste puisque l’utilisateur peut identifier le phénomène de « dry-puff » et modifier l’utilisation des appareils (durée de la bouffée et intervalle entre chaque aspiration) tandis qu’aucune méthode de laboratoire ne peut le détecter. Il est évident à partir de la photo des différents modèles que chaque appareil a une taille de cartouche différente et peut-être certains appareils n’ont pas eu suffisamment de liquide pour produire 150 bouffées normales.

A mon avis, chaque dispositif doit être testé par un utilisateur avant d’être testé dans le laboratoire. Cela permettrait de garantir que l’expérience est reproductible de manière réaliste et pragmatique, de sorte que ses résultats pourraient avoir une signification pratique. Je crois que les différences de caractéristiques de l’appareil, la quantité de liquide et leur capacité à abaisser leur température au cours de ces intervalles courts entre chaque bouffée ont joué un rôle majeur dans la différence de quantité de produits chimiques rejetés (dans certains cas, les auteurs ont trouvé une quantité 10 fois plus élevé d’acroléine ou de formaldéhyde dans un dispositif par rapport à un autre, ce qui est assez difficile à expliquer).
En conclusion, si on peut dire que le niveau de toxines libéré dans la vapeur de e-cigarette est beaucoup plus faible par rapport à la fumée de tabac, il n’est pas possible d’être certain que l’utilisation des appareils par des utilisateurs réels et dans des conditions réelles conduirait à la production de tels produits chimiques toxiques dans les quantités trouvées dans cette étude. »

Cela m’a personnellement rappelé les prémices de l’étude Clearstream sur le E-liquide Flavour Art. Le tout premier protocole expérimental montrait déjà que le cigarette électronique était très nettement moins cytotoxique que la cigarette classique. Cependant, dans certains cas, la vapeur de Ecigarette détruisaient tout de même des cellules. La communauté des utilisateurs de cigarette électronique avait alors critiqué le protocole expérimental qui n’était vraisemblablement pas comparable à une situation normale d’utilisation de la cigarette électronique. Il est probable notamment qu’il y avait surchauffe de la cigarette électronique et surtout qu’on assistait en fin d’expérience à des situations où il n’y avait pratiquement plus de liquide dans les cartouches utilisées à l’époque. Il y avait alors eu des soupçons de créations d’acroéline. En s’appuyant sur les remarques des vapoteurs, et en contrôlant notamment le niveau de liquide les scientifiques ont alors obtenu les résultats publiés sur l’absence de cytotoxicité de la vapeur de cigarette électronique.

Par ailleurs, les analyses de l’étude ont porté sur des liquides dont on ne connaît pas du tout la composition. Il est très dommage de ne pas avoir utilisé le même liquide dans toutes les cigarettes électroniques en variant sa composition et son origine. En effet, les auteurs de l’étude du Docteur Goniewicz utilisent uniquement des cartouches et des cartomiseurs pré-remplis, c’est donc avec quasi certitude du liquide chinois. Je ne vais pas lancer de polémiques sur les liquides chinois qui sont peut être de qualité, mais pour avoir visité plusieurs usines en Chine, les procédures de remplissages sont plus ou moins hygiéniques d’une usine à l’autre. J’ai notamment fait deux vidéos lors de ma dernière visite en Chine que je mettrai prochainement à disposition des abonnées de la page google+ d’Absolut Vapor où on voit dans un cas un remplissage dans une chambre totalement aseptisée et un remplissage dans des conditions assez douteuses. De même comme je le signalais dans cet article, les conditions de fabrication diffèrent sensiblement d’une usine à l’autre.

Pour conclure, il me semble que la question de la toxicité de la cigarette électronique n’est pas complètement tranchée. Pour le moment toutes les études sur le sujet montrent qu’elle est très nettement moins nocives que la cigarette classique. Des études selon un protocole expérimental semble-t-il plus réaliste à partir de liquides Flavour Art a montré que la cigarette électronique n’était pas cytotoxique pour des cellules de poumons et du cœur. Cependant, aucun vendeur de cigarette électronique et de eliquide ne devrait affirmer que la cigarette électronique est parfaitement saine comme on le voit trop souvent sur certains sites et dans certaines boutiques. Cela peut créer un amalgame entre ceux qui veulent vendre à tout prix sans se poser de question sur les produits qu’ils commercialisent et les autres. Il me semble que cela joue sur la crédibilité de tous ceux qui croient en la cigarette électronique et sont dans une démarche scientifique rationnelle qu’ils soient consommateurs ou vendeurs.

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Sylvain Filatriau

Texte original du commentaire du Docteur Farsalinos :

« The recently study by Goniewicz et al about the levels of toxicants in vapour from electronic cigarettes is very interesting in that it answers to some questions but also raises even more.
First of all, it should be admitted that this is yet another study showing that e-cigarettes are far less harmful compared to tobacco cigarettes. Even though some toxic substances were found, they were present in significantly lower amounts compared to tobacco.
This study however raises a lot of questions. First one is sample selection: the devices used were what we call « first generation » devices. We know that they are not so helpful in maintaining smoking cessation. There are several issues with such devices like low battery efficiency, taste and amount of vapor produced, duration of use before needing recharge etc.
Another important issue is the methodology: 10 seconds interpuff duration is completely unrealistic. We cannot blame the authors because they used this method after monitoring 10 experienced users, however, we must emphasize that both puff duration and interpuff interval used in this study were unrealistic. The short interpuff interval can probably lead to overheating of the device and subsequent production of toxic substances. Additionally, i cannot explain why they tested each device for 150 puffs. Are we sure that the devices had sufficient liquid in order to produce 150 puffs? The presence of vapour coming from the device is in no way ensuring that dry-puff phenomenon (the burning taste coming from insufficient liquid supply to the wick) did not occur during the experiment. And this may lead to production of toxic substances, however it represents an unrealistic setting since the user can identify dry-puff and modify device use (puff duration and interpuff interval) while no laboratory method can detect it. It is obvious from the supplementary figure 1 that each device has different size of cartridge, and perhaps some devices did not have sufficient liquid to produce 150 normal puffs.

In my opinion, each device should be tested by a user before being tested in the laboratory setting. This would ensure that the experiment is reproduced in a realistic-pragmatic way, so that its results could have any practical meaning. I believe that the differences in device characteristics, amount of liquid and ability to lower their temperature during such short interpuff intervals have played major role in the difference in the amount of chemicals released (in some cases they found 10 times higher acrolein or formaldehyde in one device compared to another, which is quite hard to explain).
In conclusion, although we can say that the level of toxins released in e-cigarette vapour is far lower compared to tobacco smoke, there is no way to be certain that device use by real users in real-life conditions can lead to production of such toxic chemicals in the quantities found in this study. »

8 réflexions au sujet de « La vapeur de liquide de cigarette électronique est-elle toxique ? La question de l’acroléine. »

  1. Merci pour cet article très bien expliqué, très clair et totalement vrai !
    Etant moi même Vendeuse de cigarette électronique et « vapoteuse » je conseillerais vivement votre page pour renseigner plus amplement nos clients qui sont de plus en plus nombreux.

  2. Merci pour cette réponse bien complète, même si il subsiste encore de zones d’ombres. Mais j’ai l’impression que le terrain est déjà bien défriché et la conclusion est de toute façon sans appel face à la cigarette…

  3. Donc dans la logique de cette étude, nos députés Européens à Bruxelles n’auront pas d’autre choix que de laisser libre, et même d’encourager la cigarette électronique, sous peine de devoir interdire la cigarette tabac, beaucoup plus dangereuse.
    Du moins si leur véritable objectif est de préserver notre santé. Mais ça c’est une autre histoire.

    • Oui c’est clair. Mais malheureusement je doute fort qu’ils se soucient vraiment de notre santé… D’ailleurs, si nous nous « mettons » tous à la cigarette électronique, plus personne ne paiera la taxe sur le tabac… J’ai bien peur qu’ils règlementent tout cela, et qu’on se retrouve à payer un flacon de e-liquide aussi cher qu’une cartouche de clope… Ceci dit, rien ne nous empêche de se faire un petit stock, tant que les prix sont abordables.

      • Pour le stock, malheureusement les flacons d’e-liquide ont une date de péremption d’environ une année. Mais vous avez totalement raison sa sent la réglementation et une belle taxe dans les années à venir, surtout que les paquets de cigarettes ne cessent d’augmenter !!

  4. des proches qui m’aiment, pensent à ma santé et la leur m’ont offert un kit à Noël. Je n’ai plus fumé de « vraie » cigarette depuis et cela ne me manque pas. Je fumais depuis 40 ans, environ un paquet / jour…
    Récemment, à l’invite de mon fils, il a été décidé que je n’utiliserai plus ma cigarette électronique en intérieur lorsqu’eux-mm et leurs enfants seraient présents. Principe de précaution auquel j’adhère volontiers. Mais l’étude que vous présentez m’a confortée dans ma « mutation ».

  5. J’ai apprécié cette article, notamment pour sa transparence et les références citées.
    C’est d’autant plus louable que vous vendez des e-cigarettes.
    Je remarque que vous ne parlez pas des goudrons produits par la cigarette et absents des cigarettes électronique. Ils faut tout de même rappeler que e semble-t-il ce sont les substances principalement responsables des cancers.
    Donc si je peux conclure ainsi: Certe, le mieux est de ne pas fumer du tout, il n’es reste pas moins qu’à défaut la e-cigarette, sous réserve d’avoir une traçabilité sur les liquides, reste bien moins dangereux que la cigarette traditionnelle!
    N’en déplaise à ceux qui veulent imposer aux autres une abstinence monacale.
    Emmanuel

  6. J’avais entendu parler de cette libération d’acroléine quand la glycérine végétale se décompose à une température supérieure à 200°C. Il semble que la solution est de ne jamais utiliser d’e-liquides 100% glycérine végétale mais avec toujours du propylène glycol. Cela aura le deuxième avantage de protéger le clearomiseur et ne pas trop l’encrasser. Et puis, comme le rappelle le pneumologue Dautzenberg, il est préférable de ne pas mettre la tension de sa batterie trop haute et de ne jamais vapoter le réservoir vide pour éviter le phénomène de la casserole vide sur le feu.

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