Depuis plusieurs mois, la plupart des gouvernements de la planète cherchent à restreindre le champ de liberté des vapoteurs. Principes de précaution tirés à l’extrême, taxations absurdes, argumentaires contestables, influence de l’industrie du tabac, restrictions des espaces de vape… malgré des enquêtes régulières affirmant que plus de 70% des vapoteurs avaient réussi à réduire sensiblement leur consommation de tabac, malgré des études scientifiques plutôt rassurantes sur la vape, depuis plus de deux ans, la plupart des vapoteurs à travers le monde ne voient pas l’avenir avec enthousiasme.
Une notable exception ressort de ce paysage : le Royaume-Uni. Le Public Health England (PHE, l’agence anglaise de santé publique) vient de publier un rapport de 111 pages évoquant positivement la cigarette électronique.
Un rapport qui donne le ton dès les premières lignes de son avant-propos
Ce rapport (dont ici un résumé de 6 pages en anglais (PDF, 480Ko)), évoque dès les premières lignes, la comparaison de la nocivité au sujet de la cigarette électronique. Avec clarté, dès les premières lignes, le directeur du PHE, Duncan Selbie, exprime sa position : « les cigarettes électroniques sont 95% moins dangereuses que les cigarettes normales, et lorsqu’elles sont accompagnées par un service professionnel d’aide au sevrage, elles aident la plupart des fumeurs à se défaire de leur dépendance au tabac« . Il est rare qu’une personnalité de cette importance parle aussi positivement de la cigarette électronique!
L’ensemble des travaux de ce rapport ont été dirigés par Peter Hajek et Ann McNeill, deux tabacologues et addictologues très connus dans le milieu de la vape.
Un rapport qui, depuis sa publication ce 19 août 2015, semble ne pas être l’objet de fortes détractions. C’est la première fois qu’un rapport ordonné par un gouvernement au sujet de la cigarette électronique note la bien moindre dangerosité de la cigarette électronique, en rapport de la cigarette classique.
Voici, en 8 points, les messages clés qui ressortent de cette étude:
1. Les fumeurs qui ont essayé sans succès d’autres méthodes pour cesser de fumer devraient être encouragés à utiliser des cigarettes électroniques, et les associations de fumeurs devraient plus promouvoir la cigarette électronique pour tenter d’arrêter de fumer.
2. Il faut encourager les fumeurs qui ne peuvent ou ne veulent s’arrêter de fumer, à passer à la cigarette électronique, pour les aider à réduire les risques de maladie, de mort, et les inégalités de santé liées au tabagisme.
3. Il n’y a aucune preuve selon laquelle les cigarettes électroniques ralentissent le déclin à long terme de la cigarette parmi les adultes et les jeunes, bien au contraire même. Même si certains expérimentent la cigarette électronique sans jamais avoir fumé, très peu de personnes n’ayant jamais fumé utilisent de manière régulière une cigarette électronique.
4. Des études récentes confirment les conclusions de l’institut Cochrane, selon lesquelles la cigarette électronique peut aider les gens à cesser de fumer ou à réduire leur consommation, même chez ceux qui n’ont pas l’intention d’arrêter de fumer. Même si d’avantage de recherches sont nécessaires dans ce domaine.
5. Lorsqu’elle est utilisée à bon escient, la cigarette électronique ne présente pas de risque d’intoxication à la nicotine pour les utilisateurs ; mais les e-liquides doivent être contenus dans des récipients avec sécurité enfant. La précision du taux de nicotine sur l’étiquetage ne soulève actuellement aucune préoccupation majeure.
6. Durant 2014, Il y a eu un changement majeur vers une perception erronée d’une majorité de personnes au sujet de la cigarette électronique. 22% des britanniques estiment, par idées reçues, qu’elles sont aussi nocives que les cigarettes traditionnelles, alors même que les estimations d’experts tablent sur une utilisation environ 95% plus sûre de la cigarette électronique, en comparaison du tabac.
7. Il est important de protéger les enfants non fumeurs et de s’assurer que les produits disponibles sur le marché sont aussi sûrs et efficaces que possible. Les nouveaux règlements prévus devraient également maximiser les possibilités de la cigarette électronique en terme de santé publique.
8. Il est important de conserver une vigilance et une recherche-développement, dans ce domaine.
Contexte britannique du marché de l’e-cigarette
Le marché de la cigarette électronique au Royaume-Uni est différent de celui français. En effet: si en France la plupart des vapoteurs achètent leur matériel dans des boutiques spécialisées ou chez des buralistes, en Angleterre une grande partie des vapoteurs, en particulier les néophytes, achète leur équipement initial et recharges au supermarché, entre lessive et fruits&légumes !
Cela peut surprendre, mais cela induit donc, pour le fumeur britannique tenté par une migration vers l’e-cigarette, une moindre information, car les vendeurs en supermarché ne sont pas toujours qualifiés pour aiguiller le néophyte vers le matériel, l’e-liquide, et les conseils de vape les plus adaptés. En outre, l’emprise des marques détenues par des capitaux liés à l’industrie du tabac est plus forte qu’en France, avec, par conséquent, une plus forte emprise de leurs modèles bridés. Nous en parlions dans une étude publiée en avril dernier, qui se basait sur une enquête de 1500 fumeurs britanniques cherchant à arrêter de fumer, en 2013, et où une étude britannique démontrait la moindre faculté à sortir de la dépendance au tabac par ces modèles d’e-cigarette bridés, type cigalike.
Les vapoteurs britanniques, notamment les néophytes, sont donc, dans leur globalité, à mieux informer et conseiller que dans d’autres pays, afin que la cigarette électronique soit une réelle aide à un possible sevrage, afin aussi qu’ils ne se découragent ni ne se détournent du produit, si leur première utilisation ne se révèle pas positive.
Par ailleurs, ce rapport a été demandé par l’agence de la santé britannique, car ce pays doit aussi transposer comme tous les autres pays membres de l’Union Européenne, avant mai 2016, la TPD (directive sur les produits du tabac).
L’e-cigarette, un médicament homologué?
Le PHE, soutenu par le médecin chef du gouvernement britannique Dame Sally Davies, rappelle toutefois qu’une attitude prudente au sujet de la cigarette électronique est requise, car nous ignorons les effets à long terme du vapotage. Par conséquent, ces cigarettes électroniques ne devraient être utilisées que comme une aide à  un sevrage tabagique, et déconseillées pour tout public ne fumant pas.
Dame Sally Davies va même plus loin, en souhaitant que la cigarette électronique soit reconnue sur le marché comme médicament homologué, ce qui lui permettrait d’être reconnu comme une aide au sevrage tabagique, avec une meilleure garantie en termes d’innocuité, de qualité et d’efficacité quant à traitement tabagique.
Bien évidemment, un tel processus d’homologation soulèverait beaucoup de questions (voire de débats sans fin) sur les produits pouvant être homologués, et ceux qui ne le seraient pas. Et, bien évidemment, il serait difficile de contenter tout le monde.
À tout le moins, le simple fait qu’un haut responsable britannique de la santé souhaite une reconnaissance comme médicament pour la cigarette électronique, est là aussi une attitude nouvelle, aux antipodes de décisions ou de discours tenus par des responsables dans d’autres pays.
Il faut aussi rappeler qu’en Angleterre, il y a déjà plus de deux ans que l’agence nationale de sécurité du médicament britannique planche sur ce sujet. Et les fabricants d’e-liquides et de matériel se sont déjà exprimés à propos de telles homologations, qui pourraient leur coûter des millions de £.
Contrôle du marché de la cigarette électronique
Dans ce rapport PDF de 111 pages, on notera aussi le plaidoyer de PHE (Public Health England)  pour un encadrement plus strict du marché de la cigarette électronique. Tout particulièrement pour mieux contrôler les marques qui sont liées à l’industrie du tabac, dont l’intérêt premier qu’ils portent au monde de la cigarette électronique, n’est peut-être pas lié à la santé publique.
Passerelle vers le tabagisme est infondée
Autre élément notable de ce rapport, c’est le rappel qu’aucune étude ne démontre actuellement que des personnes ayant commencé par vapoter, migrent vers le tabac. Sur ce blog nous avons déjà évoqué nombre de ces études allant en ce sens, mais c’est la première fois qu’un rapport commandé par un gouvernement l’écrit aussi clairement.
En outre, la quasi intégralité des 2,6 millions de vapoteurs britanniques réguliers sont des anciens ou actuels fumeurs. En France, la tendance est identique: le baromètre INPES publié par le ministère de la Santé fin février 2015, rapportait que 98% des vapoteurs français étaient également dans ce cas.
En ce qui concerne la prévalence nicotinique ou tabagique des jeunes, rien ne permet non plus d’affirmer avec certitude que l’utilisation d’une cigarette électronique les fait devenir dépendants ou utilisateurs réguliers du produit. C’était par ailleurs, en mai 2015, l’objet d’une étude galloise auprès de 10000 ados, qui le reconnaissait, tout en rappelant, en parallèle, la vulnérabilité potentielle de cette population dû à une moindre information.
Informer la population, casser les idées reçues, améliorer l’image de la cigarette électronique
Le PHE note aussi que, si de plus en plus de vapoteurs sont convaincus de la pertinence de la cigarette électronique dans la réduction ou l’arrêt du tabac, la perception négative auprès de la population dû à de mauvaises informations ou des idées reçues est croissante. Outre-Manche, ce sont 22% des britanniques qui croient que les cigarettes électroniques sont aussi nocives, sinon plus, que le tabac. Une opinion générale qui a quasiment triplé en deux ans! Cela a pour effet probable de désinciter certains fumeurs à passer à la vapeur. Au détriment de leur santé.
Ceci est dû à plusieurs facteurs. Tout d’abord l’inconnue des effets de la vape à long terme. Mais aussi à des effets médiatiques détestables, mettant l’espace de quelques heures des brèves inquiétantes au premier plan de l’actualité sur tous les sites et chaînes d’infos, avant qu’elles ne soient démenties par des spécialistes de la question. Le meilleur exemple en ce genre, en passe de devenir un cas d’école, reste la fameuse étude sur les risques cancérigènes liés au formaldéhyde de janvier dernier. Ou comment une étude à la méthodologie hautement contestable a terni durablement un produit, par le fait de médias s’étant précipité sur une brève, sans analyse critique, ni interview de spécialistes de la question.
En conclusion, ce rapport gouvernemental de 111 pages est donc très intéressant. Sans minimiser les risques liés aux inconnues de l’inhalation de vapeur d’e-liquides à long terme, ce rapport consiste, entre autres, en un plaidoyer en faveur d’une déstigmatisation de la cigarette électronique, en cassant des idées reçues. Afin non seulement qu’elle soit mieux perçue par l’opinion publique, mais aussi et surtout que la cigarette électronique permette à des fumeurs d’augmenter leur espérance de vie, dans une optique de santé publique.
Il est à espérer que ce rapport britannique en appelle d’autres du même genre à travers le monde, afin de contribuer à lutter plus efficacement contre le tabac et ses méfaits à long terme.