Ce 24 février 2015, Marisol Touraine, ministre de la santé, a présenté son plan national de réduction du tabagisme (PNRT), qui évoque en de grandes lignes des objectifs ambitieux, en ce qui concerne le tabac, mais aussi la cigarette électronique.
Le plan national de réduction du tabagisme (PNRT) dans ses grandes lignes
Le Plan National de Réduction du Tabagisme vise avant tout, comme le précise son nom, à réduire la consommation générale de tabac, et plus spécifiquement celle des jeunes. Des objectif ambitieux visent à réduire de 10% le nombre de fumeurs d’ici 5 ans, et à créer la « première génération de non fumeurs » d’ici 20 ans.
Pour cela, Marisol Touraine s’appuie sur 3 axes.
Le 1er axe concerne l’entrée des jeunes dans le tabagisme, avec diverses mesures comme l’adoption des paquets neutres, l’interdiction de fumer en voiture en présence d’enfants de moins de 12 ans, ou, concernant le domaine de la cigarette électroniques, l’encadrement plus strict de la publicité et l’interdiction du vapotage dans certains lieux publics, ce dernier point en anticipation de la directive sur les produits du tabac (TPD) qui sera effective en France au plus tard en mai 2016.
Le 2e axe vise à aider les fumeurs à arrêter de fumer. Entre autre, en fimpliquant plus fortement les médecins traitants, et en améliorant le remboursement du sevrage tabagique.
Le 3e axe vise plus spécifiquement à « taper » sur l’économie du tabac. En créant un fonds dédié aux actions de lutte contre le tabagisme, en renforçant la transparence sur les activités de lobbying de l’industrie du tabac, et en accroissant la lutte contre l’industrie illicite du tabac.
Pour approfondir, vous pouvez consulter le dossier PDF à ce sujet, sur le site du ministère de la santé. En dépit de l’intérêt évident des mesures spécifiques à la lutte anti-tabac, nous allons nous focaliser sur ses potentielles répercutions sur le marché de la cigarette électronique et sur la vie des vapoteurs.
Quid de la cigarette électronique?
Dans son discours, Marisol Touraine évoque, longuement, le cas de la cigarette électronique.
Tout d’abord, elle affirme faire une nette distinction entre fumer et vapoter comme l’avait déjà proclamé le conseil d’Etat et une récente jurisprudence de la cours de cassation. Pour plus de détail, lire cet article sur l’état législatif de la cigarette électronique en France en 2015. Un peu plus loin, elle affirme : « Tout ce qui peut aider les fumeurs à arrêter est bon à prendre, y compris la cigarette électronique« . Ces mots sont plutôt en rupture avec le discours habituel des politiques qui ont jusqu’à aujourd’hui plutôt présenté la vape comme une alternative au tabac mais pas comme une méthode de sevrage.
Ensuite elle revient sur un point évoqué avec insistance depuis 2013, elle rappelle souhaiter que soit « interdit de vapoter […] sur les lieux de travail, et dans les transports collectifs« . Une question se pose : va-t-il falloir créer des espaces vapoteurs comme des espaces fumeurs dans les entreprises ? Car il est clair que les deux ne peuvent pas coexister puisque autant le tabagisme passif est une réalité, autant le vapotage passif n’existerait pas d’après les études italiennes et françaises de ces dernières années.
Sa crainte justifiant ces mesures provient du fait qu’elle cherche à  se prémunir d’une potentielle porte d’entrée des jeunes vers la cigarette classique à cause de la dépendance à la nicotine contenu dans les e-liquides.
Tout d’abord, rappelons que même si la nicotine est potentiellement très addictive, en des doses normales de consommation, elle n’est ni mortelle, ni cancérigène (au contraire des dizaines d’autres produits présents dans la cigarette). Par ailleurs, la nicotine dans un e-liquide n’est qu’un composant optionnel, et dans le cas des e-liquides sans nicotine, la cigarette électronique ne peut générer aucune dépendance psychoactive.
Notons aussi que la crainte du ministère de la santé selon laquelle la cigarette électronique serait une porte d’entrée vers la cigarette classique est démentie par plusieurs études dont l’enquête Etincel de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). En outre, selon une étude récente de l’INPES sur laquelle s’est appuyé le ministère de la Santé pour élaborer ce plan de réduction du tabagisme, 98% des vapoteurs français sont des fumeurs ou des anciens fumeurs.
Que retenir de ce plan national de réduction du tabagisme?
En résumé, si nous pouvons nous réjouir de ce plan national de réduction du tabagisme car il va dans le sens d’une amélioration de la santé publique, nous ne pouvons qu’être dubitatifs face aux idées reçues et aux mesures prises contre la cigarette électronique.
En l’absence d’études sur le long terme des effets de la cigarette électronique (bien que toutes soient encourageantes), interdire la cigarette électronique aux mineurs et limiter son utilisation dans des lieux accueillant spécifiquement des enfants, aurait probablement été bien suffisant pour limiter l’usage et le risque de quelconque porte d’entrée vers la dépendance à la nicotine, dont semble s’inquiéter Marisol Touraine.
Pour autant, rien n’impose d’interdire le vapotage sur les lieux de travail dans leur ensemble, si l’objectif avoué est de chercher à se passer de la cigarette classique, et dans la mesure où le vapotage passif ne présente aucun danger sanitaire selon toutes les études sérieuses sur le vapotage passif engagées à ce sujet.
Aussi, rien n’impose de limiter drastiquement la publicité sur la cigarette électronique, dans la mesure où la cible principale de ce marché ne pourrait être spécifiquement les jeunes, mais, d’abord, un public de fumeurs ou d’anciens fumeurs, quelque soit leur âge. Au risque de désinciter des fumeurs à  essayer la cigarette électronique.
Présenté à l’Assemblée Nationale
Notons toutefois que ce plan sera présenté dans le projet de loi santé qui sera en débat d’ici quelques semaines à l’Assemblée Nationale. Tous les points présents dans ce plan national de réduction du tabagisme seront intégrés ou rejetés, par amendements.
En temps et en heure, il conviendra donc à nos députés d’être vigilants sur l’évolution législative de la cigarette électronique, et de ne pas tomber dans le piège de l’amalgame ou des idées reçues.
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