En mai dernier, la Commission Européenne avait publié un très intéressant baromètre sur l’état de la vape en Europe, en relevant nombre de disparités dans le mode de consommation entre les pays européens, et les motivations des fumeurs à passer à la cigarette électronique, et qui se basait sur enquête auprès de 28000 personnes à travers l’Europe (1000 par pays).
Nous en avions parlé sur absolut-vapor, c‘était un document fourni de 214 pages, qui se donnait pour mission de mieux aider les pays à transposer la directive européenne sur les produits du tabac (TPD) pour mieux cerner le profil des vapoteurs pays par pays, à travers des données statistiques comparatives. Le Docteur Farsalinos revient sur certaines de ces données, qu’il commente, en ne se basant que sur ce document de l’Union Européenne. Aussi, on notera une grande décorrélation entre les chiffres évoqués en communiqués de presse par la Commission Européenne, et les données présentes dans ces documents. Le Dr Farsalinos s’exprimait lors du VapExpo, le grand salon autour de la cigarette électronique et de la vapologie, à Paris, le week-end dernier.
Vidéo de Konstantinos Farsalinos s’exprimant lors du Vapexpo
La vidéo ci-dessus est très intéressante, car M. Farsalinos explique ces chiffres, issus de rapports de la Commission Européenne, et pourquoi ils sont très encourageants, tant en terme de réduction de tabagisme, qu’en terme de non-attrait envers des publics jeunes ou non-fumeurs.
Un seul exemple à ce sujet : ceux qui n’ont jamais fumé ne représentent que 4% des vapoteurs au niveau européen, parmi lesquels 90% n’ont vapoté des e-liquides nicotinés que très occasionnellement. Ces données suggéreraient donc que cette population non-fumeur ne tombe pas dans quelconque dépendance liée à la nicotine présente dans ces e-liquides. À défaut d’être un argument irréfutable d’un point de vue scientifique, cette donnée pourrait néanmoins mieux aiguiller certains chercheurs afin de confirmer ces statistiques, et d’orienter des politiques publiques vers moins de diabolisation de la cigarette électronique.
M. Farsalinos évoque aussi le fait que, pour la seule France, ce sont 75,7% des vapoteurs qui ont arrêté totalement de fumer, ou réduit sensiblement la consommation de tabac. Certes, 75% n’est pas 100%… mais ces chiffres sont remarquables et mériteraient d’être bien mieux pris en considération par nos législateurs, dans une optique de diminution du tabagisme !
Un rapport européen très détaillé pays par pays, mais aux résultats parfois étonnants
Toutefois, certaines données mises en avant dans un communiqué de presse de la Commission Européenne semblaient étrangement basses, pour les spécialistes de la vape. Par exemple, une statistique avançant que seulement 14% des vapoteurs européens avaient réussi à se sevrer du tabac par le biais de la vape, très en deçà des 35% ou 40% communément admis. En réalité, cette statistique regroupait les vapoteurs réguliers, avec tous ceux ayant déjà expérimenté la vape. Une manière comme une autre d’amoindrir les données sur la probabilité de réussites de sevrage tabagique par la cigarette électronique, pour un public composé de gouvernements et de médias généralistes, parfois peu connaisseurs du sujet.
Ci-dessous un tableau intéressant, qui compare les données statistiques selon différentes manières : en ne comptant que les vapoteurs actuels, en comptant vapoteurs actuels et passés ; ou en comptant tous ceux ayant expérimenté la vape.
Les statistiques ci-dessous valent pour l’Europe entière.
Taux de sortie du tabac par le vapotage, en Europe
Avec ces mêmes chiffres à profusion, en se basant sur le même eurobaromètre, le docteur Farsalinos tire pourtant des enseignements bien différents, et plus cohérents avec ce qui semble être la réalité de la vape. À chacun d’éclairer le faisceau sur les données qui arrangent le plus. Mais alors, reste à savoir si la réduction du tabagisme est une priorité réelle dans les politiques publiques, et si elle est incitée par la commission européenne qui décide de mettre en avant les données qu’elle souhaite, ou non.
Comme vous le voyez ci-dessus, en fonction du public étudié, les résultats sont sensiblement différents. La Commission Européenne, par un communiqué de presse, avait évoqué les 14% d’européens (en bleu), pour qui la cigarette électronique avait été efficace dans une optique d’arrêt du tabac. Plus généralement, la Commission Européenne évoquait les 51,2% de personnes qui ont arrêté de fumer, ou réduit leur consommation, à travers l’Europe (addition des chiffres en bleu de la 2e colonne).
Le Dr Farsalinos, quant à lui, parle de 67,3% des utilisateurs actuels de la cigarette électronique qui ont arrêté de fumer ou réduit leur consommation de tabac (addition des chiffres en violet), à niveau européen. Soit un chiffre près de 5 fois supérieur !
Cette donnée est à mettre en comparaison avec les 10 à 20% de succès pour un sevrage tabagique avec le patch nicotiné.
Concernant la France, ce sont près de 40% des vapoteurs qui ont arrêté de fumer, et 35% qui ont réduit sensiblement leur consommation!
Avec ce même document officiel à disposition, le Dr Farsalinos a aussi réexaminé les données, sur la seule France.
Taux de sortie du tabac par le vapotage, en France
Sur ces données, concernant la France spécifiquement, la Commission Européenne avait mis en avant que 47% des français avaient arrêté de fumer ou réduit leur consommation (addition des chiffres en bleu dans le tabeau ci-dessus). En comptabilisant les vapoteurs passés, la Commission Européenne a donc inclus tous ceux qui, pour diverses raisons, se sont détournés de la cigarette électronique. En incluant ceux pour qui, peut-être, la cigarette électronique aurait pu être un bon moyen pour dépasser l’addiction au tabac, mais qui n’ont peut-être pas opté initialement pour de bons arômes, un bon taux de nicotine, ou du matériel adapté à leur addiction au tabac…
Toujours est-il, avec les mêmes données statistiques circonscrites aux seuls vapoteurs actuels (ce qui renforce la fiabilité), le chiffre réexaminé par le Dr Farsalinos est de 75%! (addition des chiffres en violet).
Tout est donc question d’interprétation. Entre les chiffres énoncés par la Commission Européenne et ceux examinés par le Dr Farsalinos, la différence est très importante. La vraie question à se poser c’est alors : pour arriver à des résultats fiables, est-il préférable de se circonscrire aux utilisateurs actuels, ou doit-on considérer aussi ceux qui ont arrêté la cigarette électronique quelles qu’en soient les raisons, voire tous ceux qui auraient touché la cigarette électronique ne serait-ce qu’une fois juste pour essayer?
D’une manière générale, la diversité des résultats dans les enquêtes sur la vape, y compris ceux touchant les adolescents, s’explique en partie par le public cible. Et c’est ainsi que des études peuvent se trouver contradictoires entre elles, peu d’adolescents non fumeurs ayant un usage régulier à la cigarette électronique, mais devant être néanmoins considérés comme ayant déjà expérimenté la cigarette électronique.
Mais au fait, qui est le docteur Farsalinos?
Konstantinos Farsalinos est un cardiologue, travaillant au centre de chirurgie cardiaque Onassis d’Athènes (Grèce), et il est une des personnalités ayant publié le plus d’études (à ce jour) sur la cigarette électronique. Il n’est ni un militant absolu de la cigarette électronique, ni un lobbyiste de la cause.
C’est d’abord un professionnel de la santé, un cardiologue, convaincu de longue date par les possibilités gigantesques de la cigarette électronique à  aider les fumeurs à quitter leur dépendance, à la condition que celle-ci soit l’objet d’études sociologiques, scientifiques, techniques, et médicales, pour la rendre toujours plus performante et crédible. K. Farsalinos est aussi l’auteur de nombreuses remarques sur des études de certains de ses collègues chercheurs, critiquant lorsque nécessaire des méthodologies ou des conclusions hâtives. Très célèbre chez les vapoteurs, ses avis, étayés, sont très souvent repris dans bien des médias touchant à la cigarette électronique.
Par ailleurs, suite à ses nombreuses recherches, il n’hésite pas, parfois, à  alerter sur certaines habitudes de vape qui peuvent se révéler dangereuses telles que le dry burn. Ceci, en attendant de déterminer la nocivité de la cigarette électronique sur le long terme, afin que la pratique du vapotage soit la plus sûre possible pour les vapoteurs.
En outre, tout cardiologue qu’il est, le Dr Farsalinos est totalement qualifié pour évoquer des statistiques liées à la cigarette électronique, lui-même ayant été l’auteur d’une des plus grandes enquêtes sur la vape, en collectant des données auprès de 19000 vapoteurs.
En conclusion, selon le Dr Farsalinos, les données publiées par la Commission Européenne sont très encourageantes, car elles confirment bien d’autres données ou études sur la réussite du sevrage tabagique par le biais de la cigarette électronique. Toutefois, la lecture des données ne peut se résumer à la seule lecture du communiqué de presse, et nécessite d’aller rechercher en détail les informations dans des tableaux statistiques, irréfutables et officiels.