Ce blog va-t-il devoir fermer suite au vote des sénateurs?

Ce 16 septembre 2015, dans le cadre de la Loi Santé, le Sénat a débattu de la cigarette électronique. Cette loi Santé (ou loi Touraine) arrivait au Sénat, après avoir été abordée à l’Assemblée Nationale en avril dernier. Une loi Santé abordant bien des sujets différents, que ce soit la lutte anti-tabac, la lutte contre les déserts médicaux, le monopole des pharmaciens, le tiers payant, et bien d’autres thèmes, et est débattue actuellement et jusqu’à début octobre.
Le rôle du Sénat dans ce projet de loi est de relire et d’amender le texte qui a été voté en première lecture à l’Assemblée Nationale, avant qu’il ne repasse pour un vote définitif à l’Assemblée Nationale, qui se déroulera, concernant ce projet de loi, début 2016.
Le monde de la vape n’avait pas beaucoup d’espoir. Malheureusement, les minces espoirs ont vite été bercés de désillusions, dans des débats au sujet de la vape mêlant avenir des buralistes et similitude avec les produits du tabac. Les conséquences pour l’activité de la cigarette électronique pourraient être importantes.

Que dit le projet de loi concernant la cigarette électronique?

Dans ce projet de loi fourre-tout, l’Assemblée Nationale avait donc planché en avril dernier sur la cigarette électronique, en même temps que cette loi Santé devait incorporer les transpositions inhérentes à la directive européenne sur les produits du tabac, qui sera appliquée au plus tard en mai 2016 dans tous les pays de l’Union Européenne.

La directive européenne prévoit d’encadrer la cigarette électronique assez strictement, et c’est, en grande partie, ce qui a été voté par l’Assemblée Nationale. Le Sénat n’a pas contesté ou amendé ces points, même si chaque vapoteur pourra être en droit de contester certaines de ces mesures, très restrictives ou contraignantes.
L’obligation de diffusion constante de nicotine, notamment, est difficilement applicable, d’un point de vue matériel.

Parce qu’une image vaut souvent mieux qu’un long discours, ci-dessous, une image produite par l’AIDUCE (Association indépendante  des utilisateurs de cigarette électronique), qui explique les conséquences de la TPD pour les vapoteurs. Pour la transposition dans la loi français, il convient de ne retenir que les mesures où il n’y a pas de point d’interrogation.

Mesures appliquées en droit français provenant de la directive sur les produits du tabac

Mesures appliquées en droit français provenant de la directive sur les produits du tabac.

Ces points ayant été votés en février 2014 par le Parlement Européen, l’état français ne pouvait revenir dessus.
En revanche, l’Assemblée Nationale est allée plus loin que ce que la TPD a voté en avril dernier, sur proposition de deux amendements, déposés par le gouvernement.

Les amendements AS1404 et AS1413, qui pour le premier, élargissait l’interdiction de la publicité et de la communication à tout ce qui peut « s’afficher » (alors que la TPD ne proposait de ne l’interdire que pour la télévision, radio, et presse papier).
Tandis que le deuxième amendement prévoyait l’interdiction de vapotage dans certains lieux clos, comme dans les entreprises.

Le Sénat, sans surprise, n’a rien remis en cause

Les débats du printemps dernier à l'Assemblée Nationale avaient tourné en défaveur de la cigarette électronique

Les débats du printemps dernier à l’Assemblée Nationale avaient tourné en défaveur de la cigarette électronique

En avril dernier, suite au projet de loi l’Assemblée Nationale, l’espoir devenait ténu. Néanmoins, il restait une possibilité, mince, de voir cette « surcouche » française dans la transposition de la directive européenne revisitée par le biais d’amendements.

En ce sens, une dizaine d’amendements au sujet de la cigarette électronique ont été déposés. Nous en évoquions quelques uns dans le billet précédent.
L’amendement principal dans la partie 5.VI de la loi Santé concernait le droit d’information et de communication au sujet de la cigarette électronique.
Il a été débattu avec d’autres amendements, qui proposaient la publicité partielle par affichettes chez les buralistes ou tout point de vente de cigarette électronique.

Suite à l’exposition des amendements par leurs dépositaires, s’en est suivi un débat entre Sénateurs. Débat qui, très souvent, a tourné sur l’avenir de la profession de buraliste, bien plus que sur les enjeux sanitaires à restreindre de manière inconsidérée la cigarette électronique, malgré un récent rapport britannique émettant des avis favorables, et rappelé par le sénateur Bruno Gilles.

Faisant fi de tout argument nouveau apporté depuis les travaux de cette commission en juillet dernier, la ministre de la Santé est restée ferme sur ses positions, en s’exprimant de manière DÉFAVORABLE À TOUS LES AMENDEMENTS en faveur de la vape.

La commission des affaires sociales du Sénat, qui elle, avait planché d’une manière beaucoup plus technique, s’est exprimée aussi de manière défavorable à tous les amendements, à l’exception de celui proposant de réautoriser la publicité par affichettes dans les lieux de vente.

Marisol Touraine, une ministre de la santé bataillant contre la cigarette électronique

Marisol Touraine, une ministre de la santé contre la cigarette électronique

La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a rappelé que sa position demeurait invariable au fil du temps : celle de ne pas inciter à la cigarette électronique pour les non fumeurs et en particulier pour les jeunes, qu’on présente souvent sans caractère nocif sans que cela soit démontré. Son argument pourrait tenir, si toutes les études démontraient qu’une écrasante majorité (98%) des vapoteurs sont des fumeurs ou anciens fumeurs. Cette statistique, qu’elle a occulté, est pourtant tirée du baromètre INPES pour le plan national de réduction du tabagisme qu’elle cherche à mettre en place!

Alain Milon

Alain Milon (groupe LR), président de la commission des affaires sociales : « Dans certaines cigarettes électroniques, il y aurait de la nicotine, mais s’il y a de la nicotine, cela ne peut pas aller vers le sevrage. » No comment.

Et que dire de l’intervention du président de la commission des affaires sociales, M. Milon (groupe Les Républicains) : « si nous nous replacions plusieurs dizaines d’années en arrière sur l’autorisation du tabac, il aurait probablement été autorisé, la publicité aussi. Car on ignorait les risques à long terme du tabac. De même, aujourd’hui, on ne connait pas les effets de la cigarette électronique à long terme. Dans certaines cigarettes électroniques, il y aurait de la nicotine, mais s’il y a de la nicotine, cela ne peut pas aller vers le sevrage. Nous ne savons pas les conséquences de la cigarette électronique. Alors,  chers collègues sénateurs, soyez prudents de la façon dont vous autoriserez ce produit« .
Sans autre commentaire, nous vous laisserons apprécier ces mots à leur juste valeur, portés par le président de la commission des affaires sociales du Sénat…

Par ailleurs, suite à cette intervention, Mme Touraine, ministre de la santé, rappelle que personne ne peut avoir la certitude que les non-fumeurs ne pourraient n’être jamais attirés par la cigarette électronique, chez les jeunes notamment. En effet, personne ne peut en avoir la certitude. Mais c’est remettre en cause nombre d’études, en particulier le rapport anglais du PHE de septembre 2015, qui affirme noir sur blanc le contraire.
Rapport fourni qu’elle a par ailleurs rejeté, en promouvant la seule étude qui contredit ce rapport, sur JAMA Pediatrics. L’excellent médecin-blogueur Jean-Yves Nau, avait d’ailleurs contesté cette étude, sur l’extrapolation qui en fut faite, en remettant en cause le traitement objectif de cette étude.
Par ses sources citées, cela ramène à l’objectivité même de Marisol Touraine, au sujet de la cigarette électronique.

Conséquences et les limites de la loi Santé telle que votée

Le blog d'Absolut-Vapor devra-t-il fermer à cause des lois qui encadreront la cigarette électronique?

Le blog d’Absolut-Vapor devra-t-il fermer à cause des lois qui encadreront la cigarette électronique?

Déjà, notons qu’il y aura une deuxième lecture à l’Assemblée Nationale en janvier prochain, ce qui pourra donner lieu à de nouveaux amendements. Même si c’est assez mal engagé, car il est peu probable qu’une majorité socialiste revienne sur des amendements gouvernementaux déjà votés en première lecture par cette même assemblée, tout n’est pas perdu.

Mais si les textes restaient en l’état, que se passerait-il?

La communication et la publicité par le biais d’Internet seraient, de fait, illégaux. Nous concernant, ce blog d’information (quand bien même il ne promeut pas directement les produits vendus sur notre boutique), et tous nos outils sur réseaux sociaux serait fermés.
Il n’y aurait quasiment plus aucun levier pour les acteurs de la cigarette électronique pour se faire connaître et reconnaître.

Plus généralement, tous les forums, groupes de discussion, blogs et sites d’information liés à la cigarette électronique sont menacés de fermeture, qu’ils soient tenus par des entités professionnelles, ou par des particuliers qui veulent simplement faire part de leur expérience. Le sponsoring, aussi, est menacé. Les vapoteurs auront moins de faculté à s’informer par eux-mêmes des bienfaits et des risques liés à la cigarette électronique.

Il sera aussi interdit de vapoter en lieu clos, tel que les entreprises ou les magasins. Au détriment de l’efficacité même du processus de sevrage par le biais de la cigarette électronique.

Concernant les boutiques, il y a encore un flou plus grand : sera-t-il autorisé de vapoter dans les boutiques, afin de tester les produits? Les boutiques physiques de cigarette électronique devront-elles se couvrir les vitrines, afin de ne pas inciter quiconque à voir l’intérieur depuis l’extérieur?
Aujourd’hui, la réponse à la première question serait négative. Mais il serait ubuesque d’imaginer une interdiction de vapoter dans des shops

En conclusion, il existe encore quelques minces leviers pour améliorer la loi en deuxième lecture à l’Assemblée Nationale, notamment pour mieux repréciser le vapotage en lieux clos, qui en certains points n’est pas clair.
En revanche, concernant la publicité et la communication, sauf grande surprise, toute évolution vers un droit de communication sur Internet ne semble pas l’option la plus probable.
Nous serons définitivement fixés, au plus tard, en mai 2016. Probablement vers mars 2016. Nous suivrons l’affaire…

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